dimanche 15 novembre 2009

Santé du corps et bien de l'âme : la reprise de sagesses antiques

Au-delà de la satire des médecins,c'est la nature du bien qu'il faut rechercher qui est en question.
Le retour aux sagesses antiques apporte un certain nombre de réponses aux critiques du 17ème siècle.

La leçon de Béralde, porte-parole revendiqué de Molière à la fin du Malade imaginaire, en est un exemple. Elle pourrait être aujourd’hui qualifiée d’« anti-interventionniste ». La volonté de guérir autrui est, en soi, un projet absurde : au contraire, ne rien faire, demeurer en repos, apparaissent comme les seules attitudes propices au rétablissement du corps car elles sont fondées sur une confiance en lui et en sa « nature ». Très inspirée par Montaigne, cette ultime leçon moliéresque rejoint également, par-delà libertins et humanistes, un « souci de soi » et une sagesse de la Physis, voire du Cosmos, qui fut formulée non seulement par la plupart des philosophies antiques, mais encore par les premiers médecins eux-mêmes : Hippocrate invitait en effet à la douceur et à de multiples précautions avant d’intervenir :

« La nature est le médecin des maladies. La nature trouve pour elle-même les voies et moyens, non par intelligence ; tels sont le clignement, les offices que la langue accomplit, et les autres actions de ce genre ; la nature, sans instruction et sans savoir, fait ce qui convient».
(Épidémies 6, 5, 1)

Molière
Le Malade Imaginaire
Œuvres, nouvelle édition, tome VI
illustrations par Boucher
Paris : 1734.
Lyon BIU-LSH

Plutarque
Les œuvres morales et meslées de Plutarque
Paris : Michel de Vascosan, 1572.
Lyon BIU-LSH

Nombreux sont les philosophes de l’Antiquité pour qui la philosophie est une véritable médecine, parce qu’elle est une thérapie de l’âme. Contre l’impétuosité des désirs et des passions (chez Platon ou les stoïciens), ou contre les troubles psychiques dus aux illusions et aux terreurs sans fondement, comme celle des enfers et des châtiments divins (Épicure, 307-270 avant J.-C.), la philosophie apporte soin et soulagement, prescrivant comme remède l’usage de la raison ou la pratique des vertus.

Martin le Roy Gomberville
Le théâtre moral de la vie humaine
Bruxelles, F Hoppens, 1678.
Lyon BIU-LSH

L'ouvrage est d'inspiration stoïcienne. Pour le stoïcien Chrysippe (280-206 avant J.-C.), la passion est une maladie de l’âme analogue au mal corporel, une « maladie de l’âme tout à fait semblable aux états fébriles du corps », et seule la philosophie peut la soigner. Cicéron (106-43 avant J.-C.) reproduit ses thèses dans les Tusculanes :

« Tout comme la santé, c'est pour le corps l'état d'harmonie qui résulte de la concordance des éléments dont nous sommes constitués, de même on dit qu'il y a santé de l'âme quand ses jugements et opinions concordent»
(Tusculanes, IV, XII, 30 ; Les Belles Lettres, t. II, p. 69).

Ignorance et passion du vrai sont deux maladies que l’homme raisonnable doit également fuir.

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